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    Mercredi 22 octobre 2008

     

     

     

     

     

     

     


     

    Mon a-Dieu à sœur Emmanuelle

     

     

     

    Madeleine Cinquin, Soeur Emmanuelle de son nom de religieuse, est passé de l’autre côté dans la nuit du 19 au 20 octobre. Elle vit.

     

     

     

    Comme beaucoup de gens, j’ai souvent été interpellé par cette petite bonne femme en blouse grise et baskets, par sa vitalité communicative et son franc-parler incisif.

     


    Sa lutte opiniâtre contre la pauvreté durant les 20 ans où elle partagea la vie des chiffonniers du Caire, principalement dans le bidonville d'Ezbet el-Nakhl, ont fait d’elle une figure emblématique et populaire de la charité. En l’écoutant parler ou en regardant des reportages sur son action, je me sentais à la fois minuscule et immense. Minuscule parce que son sens du dévouement et son audace – elle ne semblait avoir peur de rien ni de personne – me renvoyait souvent à mes lâchetés et à mon égoïsme. Mais aussi immense parce qu’au-delà de sa personne, se révélaient la grandeur de l’humain et son extraordinaire potentiel d’amour.

     

     

     

    Ce qui m’a particulièrement touché chez cette femme est son universalité de cœur et d’esprit. Elle n’accordait que fort peu d’importance aux dogmes et aux frontière doctrinales, et ne s’en cachait pas, même si ce n’est pas ce que les media ont le plus retenu de sa personne. Pour elle, l’amour était au-dessus de tout. Elle aimait évoquer le jour de sa mort en disant « Lorsque je vais me retrouver devant Dieu, il ne me demandera ni mon certificat de baptême ni si je suis allé régulièrement à la messe, non, il me demandera si j’ai su aimer ». Sœur Emmanuelle pratiquait un dialogue interreligieux de terrain, sans carcan institutionnel ni arrières pensées de prosélytisme. Elle oeuvrait à sa façon aux rapprochement entre Juifs, Chrétiens et Musulmans en espérant un temps où la foi ne serait plus un obstacle entre les hommes mais une énergie commune mise au service de toute l’humanité.

     

    La religion, en tant que système et institution, n’était pas son affaire. Elle fut souvent écartelée entre le devoir d’obéissance lié à ses vœux de religieuse et sa conscience de femme libre, qui s’accordait mal avec les choix et orientations de la hiérarchie catholique. L’Eglise qu’elle aimait était l’église d’en bas, l’église de terrain, celle de la grande fraternité humaine, de la simplicité et de l’amour sans condition. Au détour de certains passages de ses livres ou d’une interview, on pouvait sentir sa souffrance de devoir se soumettre. Cette souffrance la travailla régulièrement, jusqu’à l’année 1993 où, à 85 ans, elle du, à contre cœur et sur ordre de sa hiérarchie, quitter l'Egypte et ses "amis les chiffonniers" auprès desquels elle aurait préféré mourir, pour prendre sa retraite en France.

    A une journaliste de l’Express (article daté du 29/06/1995) qui l’interrogeait sur sa vocation religieuse, elle répondait : « Je n'ai jamais choisi la voie de l'Eglise, jamais de la vie! J'ai choisi Dieu, ce n'est pas pareil! Les structures de l'Eglise ne m'intéressent absolument pas. Lorsque j'avais 20 ans, il n'y avait qu'une voie pour servir Dieu totalement: la vie religieuse. (…) aujourd'hui, je n'aurais probablement pas suivi la voie que vous appelez l'Eglise, j'aurais choisi une cause et je m'y serais dévouée. Je voulais faire de ma vie quelque chose qui ne meure pas, quelque chose d'absolu, parce que j'avais le sentiment que tout passe, tout coule, et qu'au milieu il y a un être qui ne coule pas, c'est Dieu. J'ai voulu entrer dans ce fleuve très limpide qui va droit à l'essentiel: l'Homme ».

     



    Ma sœur Emmanuel, merci pour ta foi en Dieu et en l’homme, indissociables. Merci pour la voie que tu as montré. Même si tu n’as pas su ou pu reprendre ta liberté face à un système dans lequel tu ne te reconnaissais pas – en cela je ne te juge pas -, ton cœur battait au rythme de la liberté du Christ et tu savais qu’il « vaut mieux obéir à Dieu plutôt qu’aux (pouvoirs des) hommes » (Actes 5, 29). Tu pressentais, au fond de ton âme, la venue d’une spiritualité du partage et de la communion entre tous, sans exclus ni discrimination, un dépassement de la religion instituée et doctrinale par l’amour évangélique transformateur, le don de sois sans étiquettes, ni frontières. Merci.

     

     

     

     Sœur Emmanuelle a fondé en 1980 l'association « Asmae-association Soeur Emmanuelle » qui aide des milliers d'enfants dans le monde de l'Egypte au Soudan, du Liban aux Philippines, de l'Inde au Burkina Faso. Elle a publié plusieurs livres, notamment "Richesse de la pauvreté" (2001), "Secrets de vie" (2000), "Yalla les jeunes" (1997), "Le paradis, c'est les autres" (1995), "J'ai cent ans et je voudrais vous dire" (2008).


    http://le-jardin.over-blog.net/article-23998130.html


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    Lundi 20 octobre 2008

     

     


    Il est bon de se sentir un peu Indien.

     


    Et de repenser à
    Little Big Man *  

     

     

     

     

     

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    "La vie dans un tepee est bien meilleure. Il est toujours propre, chaud en hiver, frais en été, et facile à déplacer. L'homme blanc construit une grande maison, qui coûte beaucoup d'argent, ressemble à une grande cage, ne laisse pas entrer le soleil, et ne peut être déplacée ; elle est toujours malsaine.

     



    Les Indiens et les Animaux savent mieux vivre que l'homme blanc. Personne ne peut être en bonne santé sans avoir en permanence de l'air frais, du soleil, de la bonne eau. Si le Grand Esprit avait voulu que les hommes reste au même endroit, il aurait fait le monde immobile ; mais il a fait qu'il change toujours, afin que les Oiseaux et les Animaux puissent se déplacer et trouver toujours de l'herbe verte et des baies mure. L'homme blanc n'obéit pas au Grand Esprit. C'est pourquoi nous ne pouvons être d'accord avec lui." FLYING HAWK, Chef OCETI SAKOWIN OYATE OGLALA

     

    Source: http://www.culture-amerindiens.com/

     

     

     

     

     

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    PhotosLP, 2007, quelque part sur la Terre.

     

     

     

    *Little Big Man   Film américain d’Arthur PENN

    http://www.lamediatheque.be/ext/thematiques/films_a_la_fi...

    http://leblogdelouis-paul.hautetfort.com/textes_choisis/


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    Lundi 20 octobre 2008

     

     

     

    Sœur Emmanuelle  Wikipedia.org
     
    Nom Madeleine Cinquin
    Naissance 16 novembre 1908
    Bruxelles, Belgique Belgique
    Décès 20 octobre 2008 (99 ans)
    Callian, France France
    Nationalité Belge
    Profession Religieuse catholique
    Humanitaire
    Distinctions Grand officier
    de la Légion d'honneur


    La religion, c'est l'Homme


    Il ne faut pas se fier aux apparences. Cette voix rapide et flûtée, ce ton chaleureux et parfois cassant, cet esprit vif et caustique appartiennent à une jeune dame de... 86 ans. Madeleine Cinquin - soeur Emmanuelle depuis son entrée dans la communauté de Notre-Dame-de-Sion, en 1929 - a trop parcouru le monde pour s'en laisser conter. On connaît l'action qu'elle mena pendant plus de vingt ans auprès des enfants des chiffonniers, dans les bidonvilles du Caire. Quand elle se lance dans cette aventure, elle a dépassé la soixantaine et elle a, déjà, derrière elle un long parcours d'enseignante entre Turquie, Tunisie et Egypte. En 1993, elle a rejoint une maison de retraite dans le sud de la France. Mais son action au service des enfants continue en Egypte et se développe du Soudan au Brésil, grâce à l'association qu'elle a fondée (Les Amis de soeur Emmanuelle, 15, rue Chapon, 75003 Paris). Jamais en repos, elle vient de publier un livre attachant au titre qui lui ressemble: «Le paradis, c'est les autres» (1). (1) Entretiens avec Marlène Tuininga. Flammarion, 170 p., 79 F.


     

     

    L'EXPRESS: Vous donnez l'impression d'avoir choisi la voie de l'Eglise comme d'autres, aujourd'hui, se font «French doctors».
    SoeUR EMMANUELLE: Je n'ai jamais choisi la voie de l'Eglise, jamais de la vie! J'ai choisi Dieu, ce n'est pas pareil! Les structures de l'Eglise ne m'intéressent absolument pas. Lorsque j'avais 20 ans, il n'y avait qu'une voie pour servir Dieu totalement: la vie religieuse. Quand je suis entrée au couvent, en 1929, aucune de ces oeuvres humanitaires n'existait. J'avais commencé à m'intéresser à la Jeunesse ouvrière chrétienne (JOC), mais ils me faisaient remplir des dossiers... Je voulais quelque chose de plus vivant!
    - Vous reconnaissez-vous dans l'engagement humanitaire actuel?
    - Je ne crois pas. Même si, aujourd'hui, je n'aurais probablement pas suivi la voie que vous appelez l'Eglise, j'aurais choisi une cause et je m'y serais dévouée. Je voulais faire de ma vie quelque chose qui ne meure pas, quelque chose d'absolu, parce que j'avais le sentiment que tout passe, tout coule, et qu'au milieu il y a un être qui ne coule pas, c'est Dieu. J'ai voulu entrer dans ce fleuve très limpide qui va droit à l'essentiel: l'Homme. Et spécialement l'enfant, qui a besoin pour s'épanouir d'une main qui tienne la sienne.
    - Pourquoi les enfants?
    - Ce sont les êtres les plus faibles. J'ai toujours eu l'impression qu'ils m'appelaient. Ma soeur était mariée, elle avait deux enfants, elle était heureuse en ménage, mais cela ne me paraissait pas suffisant. Moi, il me fallait le monde.
    - Ceux qui s'occupent des enfants ont souvent été des enfants blessés. Est-ce votre cas?
    - Peut-être, après tout... J'ai perdu mon père quand j'avais 6 ans et je crois que j'en suis encore marquée. Cela a produit, chez moi, une sorte de trou, de manque, d'appel à ce qui ne meurt pas, à ce qui ne disparaît pas. La relation qu'on établit avec Dieu peut d'autant plus apparaître comme une réponse à cela qu'elle traverse toutes les dimensions. Elle est constante, verticale et horizontale, car on trouve aussi Dieu dans les êtres. Et particulièrement chez les enfants, victimes, comme j'en ai trop vus, de la famine ou de la société.
    - Votre désir d'absolu, était-ce le besoin de rompre avec la vie bourgeoise?
    - Plutôt l'envie de couper avec la fascination pour la bagatelle: ce qui brille, ce qui est amusant, ce qui est «un peu champagne». A 20 ans, j'avais la passion de vivre. Je n'ai pas goûté à tout parce que, heureusement, ça ne se faisait pas à l'époque. Je n'étais jamais satisfaite. Je voulais toujours une belle toilette, un bijou de temps en temps, une soirée au théâtre ou au cinéma, un séjour en Angleterre. Jamais ce sentiment d'insatisfaction ne me quittait. J'oscillais comme un pendule entre le Seigneur et les plaisirs. Je me suis dit: je ne peux pas continuer, allez hop! je m'en vais pour être enfin libre. Les voeux monastiques me libéraient de tout. Encore mon goût pour la bagatelle ne m'a-t-il pas quittée: il y a quelques jours, j'ai fait arrêter un ami devant... une vitrine de chapeaux. Et ce manteau de vison, à Bruxelles, l'autre fois, à l'aéroport: je suis restée plantée à le regarder et à le caresser pendant que tout le monde me cherchait! Heureusement que je ne me suis pas mariée, j'aurais coûté cher à mon mari.
    - Choisir l'amour du genre humain, n'est-ce pas refuser d'aimer une seule personne?
    - Sans doute. Quand j'étais professeur, un de mes collègues me plaisait énormément. Pour une religieuse, cette situation est plus simple à résoudre que pour un prêtre: on peut toujours écrire à Rome pour être délivrée de ses voeux. J'avais entre 30 et 40 ans - âge redoutable pour les femmes, dit-on. Le choix n'a pas été facile.
    - Comment peut-on être religieuse sans être mystique?
    - Le mysticisme recouvre l'invisible, qui devient visible. Moi qui suis très concrète, j'ai toujours un peu peur d'une exaltation; j'aurais l'impression de me tromper moi-même.
    - Avez-vous pris la place de ces missionnaires dont, enfant, la vie a inspiré votre vocation?
    - Je n'ai pas été rôtie et mangée comme eux! Je n'ai jamais éprouvé les risques ni les souffrances des premiers missionnaires d'Afrique. On dit que j'ai vécu au péril de ma vie chez les chiffonniers du Caire, mais c'est faux! J'ai tout de suite été vraiment très aimée par eux. Je n'ai souffert ni de la peur ni de la faim.
    - Quel est l'avenir de leurs enfants?
    - C'est trop tôt pour le dire. Quand je suis arrivée, en 1971, les parents refusaient que leurs enfants s'instruisent. Il a fallu que nous construisions des écoles en plein bidonville pour les arracher à leur sort. Dans ces années-là, ces petits étaient si sauvages que les maîtres n'en voulaient pas. Il faudra attendre une génération pour savoir comment ces enfants vont évoluer.
    - Votre dernier combat, c'est le Soudan. Le responsable de votre association a été jeté en prison là-bas...
    - C'était l'an dernier. J'ai dû demander à ma provinciale l'autorisation d'y aller. J'ai fait prévenir l'ambassadeur de France que j'allais demander un audience au chef religieux Hassan el-Tourabi, que je connais personnellement, pour lui parler de l'affaire. Ce seul message a suffi pour que notre représentant, Kamal Tadros, un diacre de l'Eglise catholique, soit libéré... Il s'occupe de nos 80 écoles de bambou et de roseaux réparties dans les camps de réfugiés autour de Khartoum, où l'on prend en charge - pour 25 dollars par an et par enfant - la scolarité et la nourriture. Etait-ce par affection pour moi ou pour éviter la médiatisation? Je n'en sais rien.
    - Craignez-vous l'expansion de l'islam politique?
    - Je ne m'interroge pas sur l'islam politique. Je m'intéresse aux gens. Je connais le problème en Egypte. L'Egyptien n'est pas un fanatique, mais il est très fanatisable. Si on donne 100 dollars à un pauvre homme en lui disant qu'il doit jeter deux bombes au nom d'Allah, il croira qu'il accomplit un acte magnifique. Les femmes reçoivent de l'argent pour acheter le voile. Leur nombre est incalculable, alors qu'il y a dix ans les femmes voilées n'étaient qu'une poignée.
    - Les femmes souffrent-elles plus que les hommes de l'islamisme?
    - Pendant mes trente années de présence, je n'ai pas réussi à faire évoluer leur situation. Elles sont considérées commes des esclaves, mariées à 12 ans, battues comme plâtre, résignées... Nous aboutirons quand les petites filles que je suis arrivée à faire scolariser à force de luttes seront plus nombreuses.
    - Et continueront à avoir dix enfants comme avant?
    - Certainement pas. J'ai beaucoup travaillé là-dessus. J'ai tout essayé, mon Dieu, qu'est-ce que je n'ai pas fait! J'ai vu des femmes allaiter un enfant à chaque sein en étant enceinte d'un troisième... Moi, je suis catholique, apostolique et romaine, je ne veux pas être active dans le domaine de la contraception, en m'opposant au pape. Mais les chiffonniers sont des chrétiens coptes, comme leurs médecins. J'ai cheminé avec eux.
    - Peut-on continuer à dire, comme le pape l'a fait en Afrique, que l'usage du préservatif est hérétique?
    - On m'a raconté qu'un missionnaire africain, de passage à Rome, lui avait demandé, un peu gêné, ce qu'il devait faire des tonnes de préservatifs qu'il s'apprêtait à emporter là-bas. Le pape lui a dit: «Mon fils, marchez avec votre conscience...» Le pape ne peut pas dire dans une encyclique qu'il est permis d'utiliser le préservatif, parce qu'alors c'est fini. Mais, dans le cas d'un village où 80% des gens sont malades, le pape ne dira rien...
    - Dans ce cas, pourquoi le dire «en général»?
    - Un jour on comprendra qu'il est le seul du monde à dire cela. La société est tellement obsédée par tout ce qui est sexuel qu'il semble que la vie de l'homme se résume à s'amuser sans avoir d'ennuis. Le pape, lui, dit qu'il faut être heureux le plus possible. C'est une culture de vie qu'il propose. Le bonheur, ce n'est pas de commencer à coucher à 13 ou 14 ans. Le pape n'est pas contre le préservatif - moi non plus - mais il est pour diminuer la nécessité du préservatif. Il faut, comme l'a dit l'abbé Pierre, un peu plus de fidélité pour qu'il y ait un peu moins de sida. C'est là-dessus qu'il faut prêcher. Sur les cas limites, tout le monde est d'accord. On n'est pas des imbéciles, on ne veut pas que tous les hommes meurent!
    - Jacques Gaillot dit cela bien haut. Est-ce un crime de lèse-Eglise?
    - Il n'a rien fait contre l'Eglise: c'est vous, les journalistes, qui l'avez manipulé. Je le connais, j'ai été invitée à sa table. Je l'ai beaucoup apprécié.
    - Avec plus de religieux comme vous ou d'évêques comme Gaillot, y aurait-il plus de vocations et la religion serait-elle plus attirante?
    - Je ne sais pas. La crise des vocations est moins forte dans les ordres cloîtrés. Actuellement, les jeunes ont une faiblesse: ils ne savent pas s'engager pour la vie. Or le prêtre doit gérer le célibat pour la vie. Ce n'est pas simple. Et la jeune fille, si elle est religieuse, c'est aussi pour la vie.
    - Et si on ordonnait des hommes mariés?
    - Ça viendra. En Egypte, j'assistais à la messe dite par des Syriens libanais de l'Eglise orientale: c'étaient des hommes mariés. Dans la communauté charismatique de l'Emmanuel, des jeunes filles sont consacrées pour un an: si elles veulent se marier ensuite, c'est possible.
    - Est-on aussi tolérant que vous dans l'entourage du pape?
    - La curie romaine n'est pas éternelle, le pape non plus. Moi, je suis plutôt pressée, mais la vie m'a appris que c'est une grande erreur. Je ne suis pas inquiète. J'ai vu l'Eglise à travers bien des pays, celle dont on ne parle pas, et qui est formidable.
    - Est-ce plus facile d'agir au nom de Dieu qu'au nom des hommes?
    - Je n'agis pas au nom de Dieu, moi. Religieuse, je dois être ouverte, fraternelle, simple. Pour moi la religion, Dieu, c'est l'Homme. Ce qui m'intéresse, c'est: «Que fais-tu, toi, pour les autres?» et non: «Vas-tu à la messe tous les dimanches?».
    - Vous connaissez la question de Bernard Pivot: «Quand vous arriverez devant Dieu, qu'aimeriez-vous l'entendre vous dire?»
    - Est-ce que tu m'as aimé? Est-ce que tu as aimé l'Homme? Qu'as-tu fait sur terre?
    - Avez-vous attendu la mort toute votre vie, comme l'abbé Pierre?
    - Non, moi, j'ai envie de vivre, mais je serai très contente le jour où je mourrai. J'aime beaucoup de choses dans la vie. Comme les glaces à la vanille; ça amuse quand je dis cela. Sur son lit de mort, François d'Assise demandait un peu de frangipane. C'est très humain, non?

     

    PHOTO: SOEUR EMMANUELLE


    http://www.lexpress.fr/informations/la-religion-c-est-l-homme-l-express-va-plus-loin-avec-soeur-emmanuelle_608610.html


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    Lundi 20 octobre 2008

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    Lundi 20 octobre 2008




    Entretien avec
    soeur Emmanuelle

    Soeur Emmanuelle s’exprime sur le sens de la vie, la souffrance et la mort. "Si tu veux vivre, tu dois aimer", dit-elle.

    Par Annie Jeanneret

    Annie Jeanneret

    http://www.buddhaline.net/spip.php?article101




    Sœur Emmanuelle (1908)

     

    Annie Jeanneret.- Vous avez dit, un jour, aimer beaucoup cette phrase d’un poète persan du Ville siècle, Shiab Istari : "Fends le coeur de l’homme, tu y trouveras un soleil !" J’aime en effet beaucoup cette phrase, car elle s’applique très exactement à ce que je vois autour de moi. Il est étonnant, voyez-vous, d’être en relation avec des femmes, des hommes, des jeunes, des enfants, et de voir à quel point le soleil fuse dès qu’on arrive à entrer plus profondément, préci-sément, dans le coeur de ces gens-Ià. Il suffit de faire un petit trou, une petite fente et, tout de suite, le rayon de soleil apparaît !

    Soeur Emmanuelle.-

    Le sourire n’est-il pas lui aussi l’une de ces « petites fentes » ?

    Exactement ! Chaque année, lorsque j’envoie des calendriers, j’écris au-dessus une petite phrase, comme : "Donne chaque jour ton sourire !"

    Et Dieu sait que vous donnez généreusement le vôtre, avec tout l’amour et l’écoute qu’il exprime... Mais derrière ce sourire, cette joie de vivre, quel est le fond de votre caractère ? Et est-ce le fait d’être religieuse, d’avoir la foi et d’avoir mené cette vie consacrée totalement aux autres, qui vous permet d’être apparemment dénuée de défauts ?

    Dénuée de défauts ? Oh non, pas du tout ! J’en ai des tas, naturellement, et je ne suis pas du tout une sainte âme, moi ! Comment vous expliquer ? Je connais des personnes vertueuses, que j’admire beaucoup : où qu’elles soient et quoi qu’elles fassent, elles y mettent toujours, précisément, un cachet de vertu admirable. N’oublions pas que virtus, en latin, veut dire « force » !

    Moi, je ne suis pas du tout comme ça ! Quant à ma joie de vivre, je crois que c’est l’amour -l’amour du Christ -, cette relation que Dieu m’a permis d’avoir avec Lui, avec ce Fils bien-aimé, depuis l’âge de douze ans, qui me porte. C’est une relation quotidienne, une méditation sur l’Evangile, sur des passages de la Bible, des grands prophètes (Hoshé, par exemple, prophète de l’amour), qui m’ont fait comprendre le sens de la vie : si tu veux vivre, tu dois aimer !

    Il n’y a pas de problème  ! Le seul problème, c’est. . . aimer ! Nous connaissons tous, par exemple, des femmes qui passent des heures et des heures, des nuits entières, auprès d’un être cher, mangeant et dormant à peine : et elles tiennent le coup ! Pourquoi ? Parce qu’elles aiment ! Comme il est dit dans L’Imitation de Jésus-Christ : « L’amour court, vole, ne s’arrête à rien, n’est jamais fatigué. » Pourquoi ? Parce qu’il possède en lui une force, un souffle qui l’emporte : c’est son moteur !

    Pendant de longues années, vous avez mené, au Caire, avec vos chers chiffonniers, une vie plus que spartiate, au milieu des ordures, des insectes, des rats : est-ce l’amour qui est en vous et que vous leur apportiez, qui vous y a aidée ?

    Remettons ce passé au présent, si vous le voulez bien, car cette longue partie de ma vie passée avec mes chiffonniers est en moi, toujours si présente. Vous dites que je leur ai apporté, que je leur apporte l’amour ? Mais eux aussi, ils m’apportent l’amour ! C’est un va-et-vient : il n’y a pas que moi qui aime, je suis aimée !

    C’est précisément cette relation d’amitié toute simple mais quotidienne qui fait que la partie matérielle m’intéresse beaucoup moins. Des rats ? C’est évident : avec les rats, nous dormons presque ensemble ! Une fois, je me suis réveillée et je me suis aperçue qu’un rat... avait dormi avec moi ! Il avait même laissé sa carte de visite, sous forme de petites crottes, et il avait eu faim, le pauvre (ce qui est étonnant, car ils sont bien nourris, chez nous, avec toutes ces ordures !). Alors, il avait mangé un petit bout du drap de mon lit. Eh bien, ce n’est pas un drame !

    Après quoi, je me lève, je vais voir mes sœurs chiffonnières, nous nous asseyons par terre, au milieu des ordures : pas de problème ! Et fraternellement, nous buvons ensemble un verre de thé. J’écoute leurs difficultés, elles me racontent comment elles ont été battues, la veille, par un mari qui avait bu cet alcool frelaté, épouvantable, et combien il ne savait plus ce qu’il faisait. . .

    Alors vous pensez bien que l’histoire de mon rat-qui-m’a-Iaissé—quelques-crottes-comme-carte-de-visite devient tout à coup risible, sans importance !

    Risible, dérisoire, en effet... Mais notre vie ne nous apparaît-elle pas, bien souvent, à la fois dérisoire, à l’image de ces petites visites de rats, et primordiale, comme le laisse entendre saint Augustin, que vous aimez citer ?

    C’est un petit enfant qui, sur une plage, essaie de « verser la mer », dans un trou creusé dans le sable, en utilisant un simple coquillage. Vous nous confiez alors : « Je suis comme ce petit enfant. Saint Augustin y voyait le symbole du cerveau de l’homme, incapable, quels que soient ses efforts, de contenir l’immensité de Dieu. C’est vrai, mais j’y vois aussi le symbole de l’océan de la misère humaine, que nous n’arriverons jamais à écoper complètement. Mais, comme ce petit enfant, je continuerai, jusqu’à ma mort, à offrir mon coquillage pour y transvaser quelques gouttes et sauver les pauvres de la marée ! »

    Je ne me rappelais pas avoir dit cela ! Ce n’est pas mal, en effet ! Mais, et pour être plus sérieuse... c’est cela, évidemment ! C’est un problème terrible que cet océan de souffrance, de misère, de mort, que j’ai rencontré au Liban, en Egypte -un peu moins en Egypte qu’ailleurs, car on n’y meurt pas de faim, bien que la vie y soit très dure -, et il est vrai qu’on se sent impuissant.

    Mais je crois en Dieu, et si je n’y croyais pas, si je ne croyais pas que Dieu est amour, et que Dieu a un faible pour les pauvres, pour ceux qui souffrent, si je ne croyais pas possible, après ce combat qui doit être le plus dur, de marcher avec eux, debout, dans la vie (même si nous n’arrivons pas à être tous debout comme je voudrais que tous le soient). . . alors je ne croirais pas non plus qu’il y ait une autre justice. Eh bien, j’y crois, à cette autre justice, et je crois qu’il y a une autre vie et que le Vendredi saint prépare Pâques !

    Vous êtes religieuse, vous êtes une femme de foi, mais nous n’oublions pas que vous avez été professeur de philosophie, que vous êtes aussi une intellectuelle et que vous avez le sens, l’art, des formules claires et poétiques. Permettez-nous de citer cette définition que vous donnez du mot vivre  : « Vivre, c’est avoir une double relation : verticale, vers Dieu, horizontale, avec les hommes, nos frères.

    Vivre, ce n’est pas cheminer tout seul, c’est progresser en cordée. La vie, c’est ce va-et-vient de mains qui se tendent, qui se serrent, qui s’agrippent, cet échange de regards, de paroles, de sourires, d’appels, de cris, qui créent entre les hommes des liens d’une solidité incomparable : cette sorte de respiration collective, ce souffle qui passe d’une bouche à une autre bouche, cette force qui passe d’un coeur à un autre coeur. »

    Oui, en effet, je crois que c’est la relation qui fait la vie ! Nous vivons (je continue à parler au présent, vous voyez !) beaucoup plus chez les chiffonniers que dans nos grandes villes d’Europe, où les individus marchent côte à côte parfois sans même se regarder, sans s’écouter, sans se sourire, dans les métros ou dans les trains. . .

    Chez nous, ce n’est pas possible ! D’abord, nos maisons ne sont pas de beaux immeubles mais de pauvres cabanes de tôle, évidemment les unes à côté des autres, et l’on entend presque tout ce qui se passe d’une cabane à l’autre, les portes étant toujours ouvertes.

    Nous avons donc une relation constante, et c’est ce regard, cette écoute, ce sourire, cette main qui se tend, ces pas les uns à côté des autres (non pas en solitaires mais en cordée), c’est tout cela -parce que c’est cela, l’homme- qui fait que nos chiffonniers sont plus heureux dans leurs bidonvilles misérables, au milieu des ordures, des porcs, des rats, que les gens qui habitent les plus beaux immeubles de Paris, de Londres ou de Washington !

    On peut donc être heureux dans des conditions aussi misérables ?

    Oui, je le crois sincèrement ! Car enfin, qu’est-ce, pour l’homme, que le bonheur ? Ce n’est pas le plaisir, ce n’est pas de manger des choses excellentes, d’être toujours par monts et par vaux pour aller s’amuser à droite et à gauche, danser, etc. Tout cela n’est pas mal, bien sûr, mais ne remplit pas le coeur de l’homme. On assouvit pour un moment quelques instincts naturels, normaux, qui n’ont pas à être critiqués, par le fait... Mais après ? Après, il y a toujours ce même vide, ce tonneau des Danaïdes qui est percé par son fond : vous pouvez y verser tous les plaisirs du monde, votre tonneau restera toujours vide !

    Chez nous, au contraire, nous avons gardé le sens de la famille. Chez nous, on se marie encore et on a des enfants (et même parfois trop, malheureusement, mais c’est une autre affaire), et cette relation d’amour et d’amitié, qui est le substrat de la vie quotidienne, donne à celle-ci une saveur que l’on a beaucoup perdue en Europe et en Amérique !

    Vous avez longtemps consacré votre vie à résoudre ces problèmes quotidiens de la misère, oubliant que vous étiez aussi une intellectuelle. Vous avez même brûlé vos cahiers sur lesquels vous notiez vos réflexions philosophiques ou poétiques. Pourtant, vous avez gardé précieusement une lettre à Marguerite Yourcenar, qui éclaire bien votre pensée pour ceux qui vous considèrent essentiellement comme une femme d’action.

    C’était en 1979 et voici ce que je lui disais.

    Ma chère Marguerite,Marguerite Yourcenar vous a répondu et l’on sait qu’elle parlait de vous avec beaucoup d’estime, et même d’admiration. Cet échange ne s’est-il fait que par correspondance ?

    Si, durant ma vie de professeur de lettres, j’ai toujours beaucoup lu, depuis ces années de partage avec les chiffonniers, je ne me sens plus le devoir de me tenir au courant de la littérature moderne : ma vie auprès de mes frères du bidonville est tellement enrichissante qu’elle est même arrivée à atténuer mon goût passionné de la lecture.

    Mais votre livre -qui m’a été donné par un jeune ami, BenoÎt Lambert-, ma chère Marguerite, a été pour moi un mets de choix que j’ai savouré, le lisant et le relisant sans me lasser, ouvrant parfois une page au hasard et m’enchantant de la phrase balancée, des termes faisant saillir l’objet et jaillir la pensée jusqu’à sa profondeur la plus secrète.

    J’ai lu tout genre d’ouvrages depuis une cinquantaine d’années : littérature, philosophie, arts et sciences, religion et théologie, que j’analysais dans des milliers de pages. Mais aucun ne m’a apporté un tel enrichissement par l’analyse de la matière et du déroulement - je voudrais même dire de l’enroulement de la pensée, escalier en spirale qui s’enfonce de plus en plus loin dans L’Inconnaissable du Philosophe de Rembrandt.

    Vous avez conçu l’ébauche de Zénon, dites-vous, dans votre jeunesse. Mais chaque page porte maintenant la frappe d’une synthèse de connaissances et d’une philosophie de l’Homme qu’on ne peut réaliser que dans l’âge mûr. Cette magistrale recherche de Zénon rejoint le mythe de Prométhée, de Sisyphe : l’humanité qui reprend à chaque siècle le tragique destin -avec une psychologie inégalée par la Genèse. La Genèse : si vous mangez du fruit de l’arbre de la science du Bien et du Mal, vous serez comme des dieux I Ils en mangèrent et se virent nus. Et l’ange les chassa du Paradis. Sous ces symboles, toute l’histoire de Zénon et de tant d’autres. Et la mort entra dans le Monde. . . Ce qui manque, disait Bergson (je l’avais au programme de Sorbonne, avec Pascal et Descartes), c’est un « supplément d’âme »...

     

    Oui, car je n’ai jamais eu l’honneur de la rencontrer. Elle m’a parlé de cette « angoisse grandissante devant le désarroi à peu près irrémédiable du monde et de la capacité de l’homme à infliger la souffrance à tout ce qui vit, y compris, d’ailleurs, à soi—même » et elle a ajouté : « ... Votre réussite à rebours, triomphalement détachée des conventions, qui semble avoir été votre vie : j’admire les renonçants, qui du reste ne renoncent à rien, car ils savent le peu de prix de ce qu’ils ont quitté ! »

    Marguerite, évidemment, était très profonde, et nous pouvions nous comprendre : sa recherche a toujours été du côté de ce qu’il y a de plus authentique dans le coeur de l’homme. Peut-être cette recherche ne l’a-t-elle pas amenée jusqu’au dépassement total de tout ce qui est philosophie, intellectualisme.

    Comme disait Pascal, il faut s’abêtir parfois, pour trouver Dieu, car notre intelligence est trop remplie de tout ce que nous y mettons lorsque nous nous cherchons nous-mêmes ! Nous voilà de retour à saint Augustin ! C’est l’océan de Dieu, que nous ne pouvons pas faire entrer dans la coquille de notre cerveau. Et c’est là que les plus grandes intelligences de notre siècle ont peut-être une connaissance de l’homme, et une connaissance de Dieu, bien moindre que celle de certains de nos chifonniers !

    À propos de vos chiffonniers, justement, Marguerite Yourcenar ajoutait : « Je me demande s’ils ne vous ont pas prouvé l’immuabilité de la nature humaine, pareille, en somme, à celle que vous aviez laissée derrière vous en France et à l’Université, avec, peut-être, quelques clichés de moins ! »

    Elle a vu tout à fait juste : j’ai été tellement enrichie par cette relation quotidienne avec mes soeurs et mes frères du bidonville ! Je crois qu’ils m’ont plus appris et plus donné que j’ai pu, moi, leur apprendre et leur donner. . .

    Vous avez noté au cours de ces années quelques réflexions, peu nombreuses il est vrai, mais pour nous si frappantes. Parmi elles : « L’âme aspire de plus en plus vers l’autre rivage et la terre s’estompe », et surtout « J’ai perdu l’Avoir, j’ai gagné l’Etre. »

    Il est vrai que j’ai dû être très active pour marcher avec mes frères et mes soeurs, mais j’ai toujours pris un temps de silence dans la journée ; car la règle religieuse de Notre-Dame-de-Sion me demande de rester chaque jour, pendant une heure, en silence, en méditation, en relation directe avec Dieu. Relation qui est aussi directe, bien sûr, avec ces frères et ces soeurs. Quand on aime, en effet, on a besoin de temps en temps de rester en silence seule avec celui qu’on aime. Alors, je suis avec le Christ, je suis avec le Père, sous le souffle de l’Esprit, avec la Vierge. Cette heure quotidienne m’est d’un prix incomparable parce qu’elle est ma source (avec l’eucharistie quotidienne vers laquelle je vais depuis l’âge de douze ans), et c’est cela qui me permet chaque fois de rebondir, d’être de nouveau remplie de cet amour du Seigneur pour mes frères et mes soeurs.

    De plus, chaque année, je me suis toujours réservé quelques jours de totale solitude. Quant au dimanche matin, je l’ai toujours consacré à l’approfondissement de la Bible.

    Tout cela, c’est la vie, c’est vivre !

    Qu’est-ce alors que mourir, pour vous ?

    Pour moi, vivre et mourir sont les deux aspects d’une seule réalité car, comme je vous le disais au début de notre entretien : « Le Vendredi saint prépare l’éclatement de Pâques », et c’est parce que le Christ est mort qu’il a pu ressusciter !

    Mais croyez-vous qu’il y ait également autre chose après la mort, pour chacun d’entre nous ?

    Je crois, je suis sûre, qu’il y a autre chose ! Je crois à la résurrection de la chair et je crois à la vie éternelle. Et je suis sûre que nous ne sommes pas des bêtes que l’on jette dans un trou avec de la terre par-dessus ni, comme dit Pascal, que « la comédie est finie » !

    Pensez-vous souvent à la mort et à la vie éternelle ?

    J’ai accroché au mur la reproduction d’une toile de Fra Angelico que je regarde chaque soir avant de m’endormir. C’est La Ronde des élus, une des peintures que j’aime le plus. On y voit, autour d’une prairie émaillée de fleurs multicolores, un ange et un homme qui dansent ensemble. Ils font une ronde, et cette ronde se dirige vers les hauteurs. Vers la fin de la ronde, un homme et un ange entrent dans un rai de lumière : ils montent vers la lumière de Dieu, la lumière éternelle, la seule qui n’ait jamais de couchant.

    Cette ronde, qui semble représenter la mort, c’est aussi le symbole de la vie ?

    Mais oui ! Cette ronde, c’est la vie ! Et je suis vraiment persuadée que la vie est une danse ! Parfois, comme au Moyen-Âge, c’est « la danse macabre », c’est vrai. . . II y a la douleur et la misère -vous en avez parlé-, il y a la souffrance.

    Mais cette danse avance, elle monte, et nous dansons, nous montons en cordée, hommes avec les hommes, anges avec les hommes. Car les anges nous aident, j’y crois profondément, et je sais que j’ai moi-même un ange qui m’aide, chaque jour, à aimer.

    Dans cette peinture de Fra Angelico sont ainsi mêlés la vie, la mort, l’amour et surtout la lumière-symbole ?

    La Ronde des élus est toujours, pour moi, une lumière, en effet ! Et je me dis : voilà, j’arrive à la fin de ma vie, donc la ronde va se terminer. . . Dans un sens, je vais lâcher la main de mes soeurs et de mes frères qui sont sur la terre, mais pour quoi vais-je la lâcher ? Je pars dans la lumière, je pars en éclaireuse ! Je pars pour continuer à les aimer, dans la lumière du Seigneur. Je pars donc en continuant à les aimer. Car, dit la Bible : l’amour est plus fort que la mort

    et les grandes eaux ne peuvent éteindre l’amour.

    Association LES AMIS DE SOEUR EMMANUELLE, 26, boulevard de Strasbourg, 75010 PARIS

    Interview extraite du livre Partager l’essentiel , publiée avec l’aimable autorisation des éditions Dangles.

    Mai 1999


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